Les rendez-vous de Philopop

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Les Rendez-vous de Philopop avec Didier Carsin

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Les Rendez-vous de Philopop avec Didier Carsin

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Les Rendez-vous de Philopop - Liberté d'expression et liberté de penser

Les Rendez-vous de PHILOPOP- émission du 15 juin 2025

              Liberté d'expression et liberté de penser

Réflexion à partir de la lecture de l'opuscule de Kant "Qu'est-ce que les Lumières ?" publié en 1784.

 

1- La liberté de penser peut-elle se passer de la liberté d'expression? 

a- On peut bénéficier de la liberté d'expression et n'être pas le moins du monde libre dans ses pensées. 

b- Comment expliquer que nous appelions “opinions personnelles” nos préjugés ? "Nous avons été enfants avant que d'être hommes et il nous a fallu longtemps être gouvernés par nos appétits et nos précepteurs" (Discours de la méthode II, Descartes)

c- L'exemple du doute méthodique de Descartes : une émancipation individuelle de la pensée est-elle possible ?

 

2- Parvient- on seul à penser par soi-même ?

a- Les circonstances de la rédaction de l'opuscule "Qu'est- ce que les Lumières ?" de Kant (1784). Le siècle de Frédéric II comme "époque d'accession aux Lumières".

b- Accéder aux Lumières, c'est pour l'homme "sortir de la minorité où il se trouve par sa propre faute". Le confort de la servitude que vise à maintenir les "tuteurs"

c- Comment sortir de la minorité ?

- l'analogie entre l'apprentissage de la marche et celui de la liberté

- l'émancipation par le moyen d'un public qui se constitue comme espace de libre discussion soustrait à toute censure 

 

3- La liberté d'expression comme condition de l'exercice et de la formation d'une libre pensée

"Pour propager les Lumières, il n'est rien requis d'autre que la liberté"

La publicité comme diffusion de la vérité (elle se propage d'elle-même, du seul fait qu'elle paraît à des hommes qui la comprennent)

 

4- La liberté d'expression peut-elle être sans limites?

a- Distinguer le domaine de la pensée et celui de l'obéissance civile, l'usage public de la raison et son usage privé

b- L'obéissance aux lois n'exige pas l'interdiction de les critiquer

c- En criminalisant l'expression d'opinions, un pouvoir despotique cherche à maintenir les hommes dans la minorité

 

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Les Rendez-vous de Philopop - La paix n'est-elle qu'un doux rêve? Kant

Les Rendez-vous de PHILOPOP, émission du 27-04-25

"La paix n'est-elle qu'un doux rêve ?"


Lecture du Projet de paix perpétuelle de Kant, publié en 1795, après la victoire des armées françaises sur les monarchies européennes coalisées contre la jeune République française.

Comme le suggère ironiquement l'enseigne d'une auberge ("Vers la paix perpétuelle") sous laquelle figure l'image d'un cimetière, la véritable paix n'est-elle pas seulement la paix des cimetières ? Dès lors, à quoi bon en parler ? Une véritable paix, -qui ne serait pas une simple accalmie entre deux guerres-, une paix perpétuelle où les hommes seraient définitivement délivrés de la menace de la guerre, une telle paix est-elle condamnée à rester un "doux rêve" pour les vivants ?

1- Le problème de la paix est surtout celui de la paix internationale

a- Il est possible d'instaurer la paix civile par le droit au sein d'un Etat

De l'hypothèse de l'état de nature -état de non-droit- à l'institution de l'Etat qui soumet les hommes à une législation commune (Léviathan, chapitre 13, Hobbes, 1651, et premier supplément au Projet de paix perpétuelle, Kant)

b- Il paraît impossible en revanche d'instaurer une paix internationale

L'inégalité de puissance entre les Etats n'a pas de limites et les rapports de puissance, en constante évolution, les contraignent à se préparer constamment à la guerre , l'effort de guerre risquant alors de les rendre tyranniques à l'encontre des citoyens (Que l'état de guerre naît de l'état social, Rousseau)

2- La raison seule peut définir les conditions juridiques de la paix et orienter en ce sens l'action politique

a- Il ne s'agit pas pour Kant de réfléchir aux normes d'une "guerre juste" et d'encadrer sa pratique par des conventions chargées d’éviter qu'elle sombre dans la folie destructrice, comme on l'envisageait traditionnellement dans "le droit des gens" ("Le droit de la guerre et de la paix", Grotius, 1625); mais il s'agit d'exclure radicalement la guerre comme moyen de règlement des conflits. Aucune guerre n'est juste car elle est un retour à l'état de nature (état de non-droit)

b- Réfléchir aux conditions juridiques de la paix, c'est envisager sa réalisation dans ce monde, contrairement au discours théologique pour lequel elle ne peut s'accomplir que dans l'au-delà (Cité de Dieu, Augustin, 426), et c'est définir un idéal vers lequel l'action politique doit s'orienter, sachant qu'on ne peut au mieux que s'en approcher.

3- A quelles conditions la paix est-elle réalisable?

a- Les 6 articles provisoires du Projet de paix perpétuelle énoncent ce qu'il faut éviter pour préserver les chances de la paix

b- Les 3 articles définitifs énoncent les conditions qui permettent de garantir la paix et d'exclure définitivement la guerre : 1- Il faut une constitution républicaine dans chaque Etat; 2- il faut une fédération d 'Etats libres (le danger d'une "monarchie universelle" ; la nécessité d'une fédération des peuples à défaut d'une "république universelle") ; 3- il faut enfin un "droit cosmopolitique" qui garantisse à un étranger de ne pas être traité en ennemi par l'Etat dont il foule le sol.

c- Conclusion : la paix est le résultat nécessaire de l'instauration du droit, à tous les niveaux : entre les individus à l'intérieur des Etats, entre les Etats, entre un Etat et les individus étrangers

4- Si le droit est la condition nécessaire de la paix, qu'est-ce qui permettra sa réalisation?

a- La paix ne serait qu'un "doux rêve" si elle dépendait seulement du bon vouloir des hommes et de la sagesse des nations. La réflexion sur l'histoire montre que sa logique de développement contraint les Etats à entrer de plus en plus dans des rapports de droit

b- Cette réflexion n'est pas un savoir ; elle ne procure aucune certitude, elle fonde l'espérance d'un progrès du droit qui peut conduire à mettre la guerre hors la loi et elle renforce tous ceux qui travaillent à la paix dans la conviction qu'il faut tout mettre en oeuvre pour agir, dès maintenant, en ce sens.

Bibliographie:

"Vers la paix perpétuelle" ou "Projet de paix perpétuelle" selon les traductions, dans plusieurs collections de poche comme Hatier ou G/F

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les Rendez-vous de Philopop - Mauvaise foi, mensonge, inconscient

Les Rendez-vous de PHILOPOP- émission du 9-03-2025

Mauvaise foi, mensonge, inconscient

Comment comprendre qu'on choisisse de ne pas vouloir savoir ce qu'on sait ?

Lecture du 2ème chapitre de la 1ère partie de l'Etre et le Néant de JP Sartre (1943) consacrée à la "mauvaise foi"

La mauvaise foi n'est pas le mensonge (ni la duplicité) par lequel on dissimule à autrui ce qu'on pense être la vérité, mais elle est mensonge à soi. A vrai dire, se mentir à soi-même, ce n'est pas mentir, c'est se faire croire ce qu'on sait être faux. La mauvaise foi est une "foi". Comment rendre compte de cette énigme ?

1- L'énigme de la mauvaise foi

a- L'homme de mauvaise foi ne simule ni ne dissimule (il saurait sinon qu'il simule ou dissimule); mais il croit à ce qu'il dit et il croit dire ce qu'il croit, alors même qu'il n'y croit pas vraiment. Comment expliquer une telle ambiguïté? Et comment peut-on se cacher la vérité si on sait ce que l'on doit se cacher ?

b- Pour comprendre une telle énigme, il ne faut pas en rester à une description psychologique, il faut analyser les conditions de possibilité de la mauvaise foi et s'interroger sur la conscience qui est à sa source.

c- Examen de la conscience dont l'activité constitue la réalité humaine et fait que l'homme ne peut jamais réduire son être à l'identité figée d'une chose. La structure paradoxale de la conscience : elle n'est pas un être qui demeure ce qu'il est mais un "être qui est ce qu'il n'est pas et n'est pas ce qu'il est".

2- Mauvaise foi et mensonge

a- Si le mensonge présuppose la dualité du trompeur et du trompé, comment le mensonge à soi est-il possible alors qu'il exclut cette dualité (c'est la même conscience qui trompe et est trompée)?

b- Une solution pour échapper à cette difficulté: réintroduire la dualité du trompeur et du trompé par l'hypothèse d'un inconscient psychique (Freud)

- L' hypothèse d'une censure qui empêche les représentations inconscientes de pénétrer dans la conscience ou qui ne les laisse passer qu'au prix d'un déguisement qui les rend méconnaissables (exemple des phobies; des lapsus, des actes manqués, des rêves, des symptômes névrotiques). L'inconscient intervient ainsi comme une cause séparée de la conscience qui produit en elle des manifestations qu'elle ne peut saisir, jouant le rôle du trompeur à l'encontre de la conscience trompée.

- Critique du caractère contradictoire de l'idée de censure : comment parler d'un mécanisme inconscient de censure qui, pour choisir les désirs qu'il refoule, doit se les représenter ? Abandon de l'hypothèse de l'inconscient qui présuppose une conception chosiste du psychisme

- La mauvaise foi comme méconnaissance qui procède de la conscience elle-même : elle est une conscience en porte à faux avec elle-même en se dissimulant ce qu'elle sait

3- L'examen des conduites de mauvaise foi permet de cerner ses conditions de possibilité

a- La mauvaise foi comme conduite défensive face à une situation difficile devant autrui, destinée à échapper à l'angoisse de sa liberté en déniant sa liberté et en se faisant croire qu'on a un être comme une chose

b- Les stratégies de mauvaise foi dans trois exemples de conduites de mauvaise foi :

- La jeune femme coquette confrontée au désir de l'homme avec lequel elle a un 1er rendez-vous

- L' homosexuel honteux de son homosexualité dans une société homophobe

- Le garçon de café exposé au regard des clients

c- La mauvaise foi est possible en raison même de la structure paradoxale de la conscience qui n'a pas l'identité d'un être, mais est un être "qui est ce qu'il n'est pas et n'est pas ce qu'il est".

Bibliographie :

L'Etre et le Néant, 1ère partie ("L'origine du néant"), chapitre 2 ("la mauvaise foi" pages 95 à 126), édition TEL/ Gallimard.

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Les Rendez-vous de PHILOPOP - Sur Jean Jacques Rousseau, entretien avec Yann Mouton

Les Rendez-vous de PHILOPOP- émission du 19 janvier 2025
                            Sur Jean Jacques Rousseau, 
                       entretien avec Yann Mouton


A propos de son livre "Jean-Jacques Rousseau, manière d'écrire et manière d'être", paru dans la collection "Au plus près" aux éditions "Les grands détroits" (2024)

Comme l'indique Yann Mouton en son introduction, il s'agit de "redécouvrir les plus moments de l'oeuvre de Rousseau, d'en interroger les passages les plus étonnants ou audacieux (...), d'en lire des extraits, dont la plupart sont connus (...) en s'efforçant de se défaire du dangereux sentiment de familiarité nourri par plus de deux siècles de référence et d'usage (...), et "d'éprouver, à l'occasion de ces lectures, la surprise ou l'inquiétude qu'inspire toute véritable rencontre"

Après une présentation générale, cet entretien visera à donner un aperçu de cette rencontre, en retenant deux extraits de l'oeuvre de Rousseau (1712-1778) parmi ceux que Yann Mouton explique et commente dans son ouvrage, afin d'en mesurer le caractère à la fois étonnant et audacieux. 

Le premier est extrait du Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes (1755); le deuxième des Rêveries du promeneur solitaire (1778). Nous les reproduisons ici: 

1- Dans cette vue, après avoir exposé à ses voisins l’horreur d’une situation qui les armait tous les uns contre les autres, qui leur rendait leurs possessions aussi onéreuses que leurs besoins, et où nul ne trouvait sa sûreté ni dans la pauvreté ni dans la richesse, il inventa aisément des raisons spécieuses pour les amener à son but.
« Unissons-nous, leur dit-il, pour garantir de l’oppression les faibles, contenir les ambitieux, et assurer à chacun la possession de ce qui lui appartient. Instituons des règlements de justice et de paix auxquels tous soient obligés de se conformer, qui ne fassent acception de personne, et qui réparent en quelque sorte les caprices de la fortune en soumettant également le puissant et le faible à des devoirs mutuels. En un mot, au lieu de tourner nos forces contre nous-mêmes, rassemblons-les en un pouvoir suprême qui nous gouverne selon de sages lois, qui protège et défende tous les membres de l’association, repousse les ennemis communs et nous maintienne dans une concorde éternelle. »

2- Le carrosse auquel appartenait le chien suivait immédiatement, et m’aurait passé sur le corps, si le cocher n’eût à l’instant retenu ses chevaux. Voilà ce que j’appris par le récit de ceux qui m’avoient relevé, et qui me soutenaient encore lorsque je revins à moi. L’état auquel je me trouvai dans cet instant est trop singulier pour n’en pas faire ici la description.
La nuit s’avançait. J’aperçus le Ciel, quelques étoiles, et un peu de verdure. Cette première sensation fut un moment délicieux. Je ne me sentais encore que par là. Je naissais dans cet instant à la vie, et il me semblait que je remplissais de ma légère existence tous les objets que j’apercevais. Tout entier au moment présent je ne me souvenais de rien ; je n’avois nulle notion distincte de mon individu, pas la moindre idée de ce qui venait de m’arriver ; je ne savais ni qui j’étais, ni où j’étais ; je ne sentais ni mal, ni crainte, ni inquiétude. Je voyais couler mon sang, comme j’aurais vu couler un ruisseau, sans songer seulement que ce sang m’appartînt en aucune sorte. Je sentais dans tout mon être un calme ravissant, auquel chaque fois que je me le rappelle je ne trouve rien de comparable dans toute l’activité des plaisirs connus.

Association Populaire de Philosophie du Havre, PHILOPOP
site de l'association: https://sites.google.com/site/philopoplh/notre-d%C3%A9marche

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Les Rendez-vous de Philopop - La Superstition

Les Rendez-vous de PHILOPOP- émission du 15-12- 2024

La superstition

C'est une croyance qui interprète des événements comme des signes exprimant une intention surnaturelle, et détermine une conduite appropriée (prières, offrandes, sacrifices, rites) pour infléchir en sa faveur les puissances surnaturelles (qu'il s'agisse d'un Dieu ou des dieux)

1- Superstition et hasard

a- Pour le superstitieux, la mort tragique d'un homme tué par une tuile qui tombe d'un toit ne résulte pas de la rencontre fortuite de séries de causes indépendantes (définition rationnelle du hasard par Cournot), mais d'une intention surnaturelle (exemple tiré de l'appendice de la 1ère partie de l'Ethique de Spinoza, 1677, et dans L'Essai sur les fondements de la connaissance et sur les caractères de la critique philosophique de Cournot, 1851)

b- b- Le hasard, notion dont la source est superstitieuse, témoigne de notre pensée primitive: "Le hasard est le mécanisme se comportant comme s'il avait une intention" (Deux sources de la morale et de la religion, H. Bergson, 1932)

2- Les causes de la superstition et l'explication de la formation des interprétations superstitieuses

a- La superstition naît de l'incertitude de l'avenir et est engendrée par la crainte (Préface du Traité théologico-politique de Spinoza, 1670). L'exemple d'Alexandre le Grand.

b- La formation imaginaire des présages et des prodiges

c- Par les prodiges, les hommes imaginent que Dieu (ou les dieux) intervient comme une volonté analogue à la leur (anthropomorphisme), en produisant des événements qui leur sont favorables ou défavorables (anthropocentrisme). D'où le problème pratique de la superstition comment faire pour gagner la faveur divine ?

3- Les conséquences intellectuelles, morales et politiques de la superstition

a- Elle entraîne une mentalité obscurantiste qui favorise l'intolérance et fait le lit du despotisme : la haine de la raison et le rejet de toute réflexion critique. Le besoin de certitude et l'intolérance

b- Sous "couleur de religion", la superstition est le moyen le plus efficace d'assurer la domination d'un gouvernement despotique, quand elle est stabilisée et canalisée par l'institution d'un culte

4- Superstition et religion

Est-elle une perversion de la croyance religieuse ou doit-on identifier toute forme de croyance religieuse à la superstition ?

- La croyance est une conviction subjective, l'assentiment à un contenu qu'elle ne peut justifier objectivement. La superstition religieuse est une croyance aux signes de ce contenu (reliques, miracles, rituels etc...) qui prétend s'ériger en savoir (elle est une illusion)

- Croire à la révélation, est-ce être superstitieux ? Religions révélées et religion naturelle.

Bibliographie:

- Appendice de la 1ère partie de l'Ethique et la Préface du Traité théologico-politique de Spinoza

- Deux sources de la morale et de la religion de Bergson (chapitre II)

- Critique de la raison pure ("De l'opinion, de la science et de la foi"), et La Religion dans les limites de la simple raison (4ème partie, 2ème section) de Kant.

- Pour lire et comprendre la Préface du Traité théologico-politique de Spinoza, cette conférence- vidéo de PHILOPOP avec son plan : https://www.youtube.com/watch?v=GhKDrRiKplk