Les Rendez vous de PHILOPOP, émission du 23 février 2020.

Peut-on représenter la volonté du peuple  ?

Cette réflexion sur la démocratie représentative et sa crise s'appuiera en partie sur les analyses de J,J, Rousseau dans le Contrat Social (1762)

Introduction  :

Les symptômes de ce qui est appelé communément une «  crise de la représentation  ». Ses causes évoquées et ses conséquences. Le problème  : si, par démocratie, on entend selon l'étymologie du mot le pouvoir du peuple, celui-ci ne perd-il pas son pouvoir en étant représenté  ?

1- La démocratie comme participation du peuple à l'exercice du pouvoir commun (l'exemple d'Athènes)  :

  • Le mode de désignation démocratique des magistrats n'est pas l'élection mais le tirage au sort

  • «  Le sort est une façon d'élire qui n'afflige personne  ; il laisse à chaque citoyen une espérance raisonnable de servir sa patrie  » (Esprit des Lois, II, 2 de Montesquieu, 1748)

2- La représentation est un dispositif inventé au XVIIIème siècle pour éviter la démocratie

  • En quel sens faut-il entendre la représentation  ? Le représentant est-il un porte-parole qui ne peut s'écarter de la volonté du représenté (le peuple), ou décide-t-il à la place du représenté et en son nom  ?

  • «  Le grand avantage des représentants, c'est qu'ils sont capables de discuter des affaires. Le peuple n'y est point du tout propre, ce qui forme un des grands inconvénients de la démocratie  » (Esprit des Lois, XI, 6 de Montesquieu). La nature irrationnelle et passionnelle du peuple.

  • Le gouvernement représentatif est le plus approprié à la condition des sociétés commerçantes modernes  : la nécessité d'une professionnalisation de la politique (Qu'est-ce que le Tiers-Etat  ? Siéyès, 1789)

3- La démocratie représentative est-elle possible  ?

  • La souveraineté du peuple consiste dans le pouvoir de faire les lois  ; l'essence démocratique de ce pouvoir (égalité des citoyens assemblés)

  • La démocratie est pour Rousseau une forme de gouvernement qui ne peut «  convenir qu'à un peuple de dieux  »  : il est nécessaire au peuple souverain (que Rousseau appelle République) de déléguer la fonction du gouvernement (qui n'est pour Rousseau que le pouvoir de faire exécuter les lois, voir le Contrat Social III, 4)

  • La souveraineté du peuple ne peut pas en revanche être représentée (C.S.,III,15 de Rousseau)  : la représentation la détruit et tend à rendre le peuple servile.

  • «  Les députés du peuple ne sont ni ne peuvent être des représentants  ; ils ne sont que ses commissaires  » (ils ne peuvent avoir une volonté indépendante du peuple, CS, III, 15)

Pour prolonger la réflexion  , on peut lire le chapitre 2 du Livre II, les chapitres 2 et 6 du Livre XI de l'Esprit des Lois de Montesquieu (1748) , les chapitres 4 et 15 du livre III du Contrat Social de Rousseau (1762), l'article n°10 du Fédéraliste de Madison (1787), les Principes du gouvernement représentatif de Bernard Manin (collection Champs-essais chez Flammarion, 1996)

https://sites.google.com/site/philopoplh/